Conférence de Rose-Marie Charest : maintenir son équilibre en gestion de crise
Articles suggérés
Sur des sujets similaires
Récemment, Rose-Marie Charest, ancienne présidente de l’Ordre des psychologues du Québec et éminente spécialiste comptant plus de 42 ans de carrière, est venue s’adresser aux collègues du bureau de Montréal.
Bien sûr, la gestion de crise est l'une des forces distinctives de notre équipe. Cependant, malgré l’urgence d’agir et la complexité des crises, chaque professionnel peut et doit maintenir son équilibre. Cela n’est pas toujours facile.
La gestion de crise ne sollicite pas que les fonctions intellectuelles. Les émotions vives vécues par les clients ne sont pas sans atteindre les professionnels qui les accompagnent. C’est inévitable et même utile. Afin de bien gérer les émotions en jeu et se protéger contre la fatigue qui en découle, il faut bien comprendre les mécanismes relationnels activés par le stress d’une crise.
Devoir gérer une crise où une victime a été abusée physiquement ou psychologiquement ou encore être responsable d’un mandat où une organisation doit annoncer plusieurs mises à pied de pères et de mères de famille apporte son lot de stress et d’émotions fortes. Il est facile de dire que nous devons nous faire une carapace, mais il est aussi facile de se projeter dans la situation de crise et de subir les contrecoups d’une compassion extrême.
Mais comment maintenir son équilibre tout en faisant preuve d’empathie? Comment gérer efficacement la crise sans revenir à la maison avec une charge mentale alourdie? C’est exactement ce dont madame Charest a traité lors de sa visite au bureau de Montréal.
D’abord, nous avons fait un tour d’horizon sur les facteurs de stress. En premier lieu, il y a la nouveauté engendrée par la crise. Puis, viennent l’imprévisibilité du déroulement de la crise, l’absence de contrôle sur l’issue et ensuite le phénomène de menace qui plane en permanence (menace intangible en lien avec la réputation, l’image et la crédibilité du client et du Cabinet).
Ces quatre facteurs amènent fréquemment le consultant en gestion de crise à vivre une certaine fatigue de compassion où il est confronté à certaines limites et où on lui demande de « régler le problème rapidement ». Cette fatigue de compassion entraîne le consultant dans une phase d’évitement ou d’insensibilité à l'égard de ses propres sentiments ou, au contraire, il porte sur ses épaules la charge émotionnelle de son client. Il y a alors augmentation de l’anxiété, de l’irritabilité et de l’hypersensibilité. Le conseil au client peut alors être teinté par cette fatigue.
Au lieu de se projeter vers une fatigue de compassion qui risque de ne pas aider le client, vaut mieux faire preuve d’empathie et utiliser des mécanismes personnels de protection. Par définition, l’empathie vise à se mettre à la place de l’autre, à comprendre ce qu’il vit, et de revenir à sa place pour l’aider à surmonter ses épreuves. C’est exactement ce qu’un consultant doit privilégier, l’empathie.
Et par mécanismes personnels de protection, on suggère de favoriser des moments d’activité physique, des moments où nous sommes en mesure d’exprimer ses propres émotions, des moments où nous sommes capables de nous affirmer et de nous ouvrir.
Nous avons tous reçu le conseil « d’apprendre à dire non », mais il est plus difficile « d’apprendre à dire oui ». Il faut comprendre les raisons qui nous poussent à accepter d’agir de telle ou telle façon. Et apprendre à mettre en œuvre ces mécanismes de protection sera aussi bénéfique pour le client. Un regard externe, posé, mais empathique, permet de penser à des solutions ou des actions souvent surprenantes et efficaces.
En d’autres mots, la relation de confiance avec le client permet d’échanger ouvertement sur la problématique, de partager sa vision, de s’ouvrir sur les émotions en cause et d’apporter des conseils judicieux. La crédibilité d’un professionnel en consultation ne tient pas à la perfection, mais à la connaissance de ses limites.