Rentrée à Ottawa : plusieurs dossiers à surveiller
Le gouvernement libéral arrive à mi-mandat. Ce sera l’occasion de faire le bilan de ses réalisations et de donner un coup de barre pour réaliser les projets prioritaires avant l’élection d’octobre 2019. À certains égards, le virage est déjà amorcé.
Le premier ministre Justin Trudeau a ainsi remanié son cabinet au cours de l’été. Il a, par ailleurs, choisi l’ancienne astronaute Julie Payette comme prochaine gouverneure générale du Canada. La controverse entourant les accusations de voies de fait portées contre elle il y a quelques années semble s’être résorbée et elle succèdera à David Johnston lors d’une cérémonie fastueuse, le 2 octobre.
Voici un aperçu des autres dossiers à surveiller cet automne.
Fiscalité des PME Le ministre des Finances Bill Morneau est dans la tempête depuis qu’il a annoncé des changements à la fiscalité des PME et des travailleurs autonomes incorporés. Les modifications, promises en campagne électorale et évoquées dans le dernier budget, concernent notamment le fractionnement du revenu, l’exonération pour gain en capital et l’accumulation des profits passifs. Les changements sont décriés par les associations d’affaires, mais leurs hauts cris ne semblent pas avoir ému le premier ministre jusqu’à maintenant. La période de consultation officielle prendra normalement fin le 2 octobre et les mesures retenues pourraient être annoncées lors de la mise à jour budgétaire de l’automne.
ALENA La renégociation de l’accord commercial tripartite entre le Canada, les États-Unis et le Mexique a commencé en août et doit se poursuivre au pas cadencé tout l’automne. Les leaders des trois pays disent vouloir conclure un accord avant la fin de l’année. Cet échéancier paraît extrêmement ambitieux compte tenu de la nature et de l’ampleur des changements souhaités. Les États-Unis ont notamment demandé un meilleur accès pour les exportations américaines dans le domaine agroalimentaire ainsi qu’une libéralisation des achats en ligne et une révision des procédures de règlement des différends. Quant au Canada, il a dit vouloir des améliorations en ce qui a trait à la mobilité de la main-d’œuvre, de la protection de l’environnement et des droits des travailleurs et des Autochtones. La prochaine rencontre entre les négociateurs aura lieu à la fin du mois, à Ottawa.
Politique étrangère L’ALENA est sans doute le plus gros dossier dont s’occupe la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland, mais il est loin d’être le seul. Le Canada a promis de déployer des troupes en appui aux missions de paix des Nations unies mais, pour l’instant, le ministre de la Défense et le premier ministre sont demeurés flous sur leurs intentions réelles. Ils ont promis de dévoiler les détails sur les modalités d’une mission de « réengagement du Canada sur la scène internationale » avant la fin de l’année. Parmi les autres enjeux qui pourraient faire couler de l’encre cet automne figurent aussi la vente de véhicules blindés à l’Arabie saoudite de même que l’entrée en vigueur imminente de l’accord de libre-échange avec l’Union européenne.
Pipelines et énergie L’épineux dossier des énergies fossiles risque de donner des maux de tête au gouvernement Trudeau au cours des prochains mois. Les libéraux sont en effet déchirés depuis le début de leur mandat entre leurs engagements envers la réduction des gaz à effet de serre – confirmés par la signature du Traité de Paris en décembre 2015 – et les impératifs de la croissance économique dans les Praires et en Alberta. Le gouvernement fédéral a approuvé l’an dernier deux projets de pipeline destinés à l’exportation de pétrole, soit le remplacement de la canalisation 3 de l’entreprise Enbridge, qui relie l’Alberta à l’Ontario, ainsi que le projet Trans Mountain de la société Kinder Morgan, qui traverse les Rocheuses et se rend au Pacifique. Ce projet est décrié par le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique, élu en juin, qui a promis de s’y opposer jusque devant les tribunaux. Quant au projet Énergie Est, il pourrait être abandonné par son promoteur, TransCanada.
Légalisation du cannabis Le décompte a commencé pour la légalisation du cannabis, prévue pour le 1er juillet 2018. L’essentiel des consultations a actuellement lieu dans les provinces, qui se débattent avec le mode de commercialisation ainsi qu’avec les implications de la décision fédérale sur la santé publique. L’enjeu demeure cependant sur le radar à Ottawa où ont actuellement lieu des consultations publiques de grande envergure.
**Élection du nouveau chef du NPD ** On connaîtra au plus tard le 29 octobre le successeur de Thomas Mulcair comme chef du Nouveau Parti démocratique. Le NPD est le dernier parti à se choisir un nouveau chef après le Bloc québécois (Martine Ouellet) et les conservateurs (Andrew Scheer). À moins d’un imprévu, on connaîtra donc cet automne les forces en présence pour l’élection de 2019.
Élections partielles Au moins trois élections partielles permettront de mesurer la popularité du gouvernement d’ici là. Les circonscriptions de Lac-Saint-Jean au Québec et de Sturgeon River–Parkland en Alberta seront appelées à voter le 23 octobre prochain. La démission de l’ancienne chef intérimaire du Parti conservateur, Rona Ambrose, a créé un vide en Alberta tandis que celle du lieutenant québécois de Stephen Harper, Denis Lebel, a libéré un siège très convoité au Lac-Saint-Jean. Le décès récent du libéral Arnold Chan a, en outre, entraîné une vacance dans la circonscription ontarienne de Scarborough–Agincourt.
À surveiller aussi Certains projets de loi et initiatives annoncés au printemps risquent de rebondir cet automne. C’est, entre autres, le cas de la modernisation de la Loi sur les transports au Canada, de la mise en place des « supergrappes » d’innovation et de la « vision » du gouvernement fédéral sur la culture à l’ère du numérique.
Il faudra aussi surveiller la création du nouveau ministère des Services aux Autochtones ainsi que la suite des travaux de la Commission d’enquête sur les femmes autochtones assassinées et disparues, qui est dans la tempête depuis des mois.
——— Jean Michel Laurin était vice-président au Cabinet de relations publiques NATIONAL
——— Karine Fortin était directrice, Communication stratégique et relations avec la communauté au Cabinet de relations publiques NATIONAL