Le Québec en campagne électorale : à GO, on se lance de la boue !
Le fil d’arrivée approche. Après un marathon de 37 jours dévalé à un rythme effréné, marqué par des rebondissements, des faux pas et truffé d’imprévus, cette campagne prend fin et, à défaut d’imposer un enjeu fondamental à trancher, induit le thème du changement comme question de l’urne.
Plusieurs diront que cette semaine était de trop. Comme la nature, la joute politique a horreur du vide. Jusqu’à la semaine dernière, le dévoilement quotidien des engagements politiques meublait en contenu les points de presse des chefs. Une fois cet effeuillage terminé, les médias avaient bien peu de matière à se mettre sous la dent cette semaine hormis les attaques et les charges à fond de train dont ils raffolent et s’abreuvent.
Tour d’horizon de cette ultime semaine.
Les bons coups – Guillaume Fillion
François Legault
M. Legault a su stopper la chute de son parti dans les sondages grâce à une bonne performance au dernier débat des chefs. Il s’en est tenu à des lignes courtes, des messages clés adressés à sa clientèle, et il a évité le piège de répondre trop longuement aux questions des journalistes.
Jean-François Lisée
M. Lisée a surpris lors du débat avec une attaque frontale envers Québec solidaire. Malgré qu’il ait pu perdre des points lors de ce coup de dés, les médias ont commencé à scruter plus attentivement le programme politique de Québec solidaire à la suite de cette attaque. Est ce que cela sera suffisant pour distancer Québec solidaire qui talonne le PQ dans les sondages? À suivre…
Philippe Couillard
M. Couillard a connu une semaine particulièrement difficile avec la controverse sur la possibilité de faire une épicerie pour une famille avec 75 $ par semaine. Il a continué ses explications lors de plusieurs tribunes, ce qui a donné de l’impulsion à la nouvelle pendant plusieurs jours. Le bon coup de la semaine pour Philippe Couillard est le fait que son parti se maintient à égalité statistique avec la CAQ dans les sondages et que tout est possible pour le PLQ le 1er octobre prochain.
Manon Massé
Mme Massé a réussi une excellente performance lors du dernier débat des chefs. Elle a présenté ses idées avec candeur et simplicité. Les appuis à Québec solidaire grimpent dans les sondages, mais cela doit se transposer en votes le 1er octobre prochain.
L’image – Guillaume Lefèvre
La dernière semaine de campagne se termine comme elle a commencé pour la majorité des partis. Difficultés à se centrer sur la stratégie, tentatives de définir des adversaires avec quelques envolées lyriques, faites de tensions et d’énervement pour les partis en avance dans les sondages, et de nombreux cafouillages dus aux candidats, lorsque ce ne sont pas les chefs eux mêmes qui se détournent de leurs agendas. Manifestement au cours de la semaine, Québec solidaire sera parvenu à s’attirer les foudres de tous les partis, à l’exception de la CAQ, qui tente d’arracher quelques points en hausse auprès du vote francophone… en abandonnant l’image policée qui aurait permis de terminer la course en beauté! Finalement, les gants de boxe sont ressortis entre les chefs de la CAQ et du PLQ, et les coups sous la ceinture ne sont jamais loin. Le chef du PQ, après la surprise du débat, aura réussi à attirer l’attention des médias en braquant les projecteurs sur les racines marxistes de Québec solidaire qui préfère se défendre d’une quelconque idéologie radicale et préserver ainsi le fait d’être un parti légitime qui a troqué son passé révolutionnaire permanent pour une révolution durable contre les changements climatiques!
… et les bonnes lignes
Les engagements auront pris moins de place cette semaine… tout comme les bonnes lignes. Cet ensemble de salves fait en sorte que la ligne d’arrivée ne sera certainement pas facile à atteindre sans égratignure pour tous les chefs de parti. À ce stade, aucun candidat ne se démarque par la hauteur ou le sens historique de ses propos. Le résultat des élections sera sans doute l’élément qui risquera davantage de passer à l’histoire.
La stratégie – Alexandre Boucher
D’un côté, une lutte pour la première place entre caquistes et libéraux. De l’autre, une bataille pour la troisième place entre le Parti Québécois et Québec solidaire. Les caravanes avalent les kilomètres tantôt en mode conquête, tantôt en mode consolidation, là où la présence des chefs (ou de la co-porte-parole!) peut faire la différence.
François Legault s’est finalement résigné à partir à la rencontre de l’électorat dans des régions éloignées, lui qui avait jusqu’à maintenant programmé son GPS dans les corridors des autoroutes 20 et 40. Aux portes du pouvoir, il sollicite l’appui des régions pour déloger les libéraux, avec des attaques à l’efficacité relative et en ramenant le thème de l’éthique tel un va-tout. En termes de suffrage populaire, les sondages lui accordent autour de 35% chez les francophones, un niveau relativement bas, mais suffisant pour dépasser d’une dizaine de points ses adversaires qui se partagent presque équitablement la balance de l’électorat.
Piqué au vif par les attaques de son principal adversaire, Philippe Couillard a affiché une combativité qui détonnait du ton employé tout au long de cette compagne. Comme s’il se battait avec l’énergie du désespoir, le chef libéral semble revigoré, prêt à sortir le venin comme ultime arme d’attaque. Gageons qu’il se serait passé de la médiatisation des courriels de son député Guy Ouellette qu’on accuse maintenant d’agir comme taupe.
Vertement critiqué pour avoir asséné une attaque frontale à l’endroit de Manon Massé lors du face-à-face de TVA, Jean-François Lisée persiste et signe. Que cette manœuvre ait été profitable ou non au Parti Québécois, Jean-François a certainement brisé un tabou et mis fin à la partie facile de Québec solidaire. L’animosité qui anime les deux formations politiques depuis la convergence avortée a montée d’un cran et laissera assurément des séquelles.
Trop occupée à gérer ses propres déclarations sur les étiquettes marxistes et socialistes ou encore sur l’aura de René Lévesque dont elle s’autoproclame l’héritière, Manon Massé a choisi de ne pas répondre aux critiques qui fusaient du clan péquiste. Par ailleurs, avec la possibilité bien réelle de doubler (et peut-même tripler) sa députation et en réussissant à faire des gains à l’extérieur de Montréal, Québec solidaire a déjà remporté son pari électoral.
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——— Guillaume Lefèvre était directeur, Stratégie santé et énergie au Cabinet de relations publiques NATIONAL
——— Guillaume Fillion était directeur, Affaires publiques au Cabinet de relations publiques NATIONAL