Élection fédérale 2021 : le jour de la marmotte
Crédit photo : LA PRESSE CANADIENNE/Sean Kilpatrick
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Les résultats de l'élection fédérale d'hier sont clairs : s'il y a eu des changements depuis 2019, ils sont très mineurs.
En effet, le jour du scrutin nous a laissé une indéniable impression de déjà-vu : chaque parti politique a essentiellement maintenu sa position, avec à peu près le même nombre de sièges. Et les libéraux seront une fois de plus à la tête d'un gouvernement minoritaire.
NATIONAL procède actuellement à une analyse détaillée des répercussions de ce nouveau parlement sur les entreprises et les organisations canadiennes. Entre-temps, nous vous présentons nos réflexions préliminaires au lendemain de l'élection :
Parti libéral
Pour le gouvernement Trudeau, il n'y a pas de petite victoire. Il s'agit tout de même de la troisième élection remportée par le premier ministre, ce qui n'est pas un mince exploit. Pourtant, compte tenu du désir des libéraux d'obtenir une majorité, les 158 sièges obtenus par le parti (au moment d'écrire ces lignes) représentent une déception relative. Les libéraux espéraient assurément un mandat majoritaire et croyaient que leur gestion rigoureuse de la pandémie leur permettrait d'obtenir la confiance des Canadiens. Force est de constater qu'ils se sont trompés. Mais compte tenu du mauvais début de campagne des libéraux, l'augmentation de leur nombre de sièges constitue un accomplissement. D'une certaine façon, cette victoire peut être considérée comme rassurante pour les troupes libérales qui ont su éviter la défaite. Les libéraux dominent toujours en Ontario, ont obtenu de bons résultats au Québec, ont conservé leurs sièges clés en Colombie-Britannique et ont également effectué une percée en Alberta, une province où ils n'avaient fait aucun gain en 2019. Cependant, trois de leurs ministres n'ont pas été réélus et ils ont perdu le vote populaire pour une deuxième élection consécutive. Le discours de victoire de Trudeau faisait allusion au besoin d'écouter le message envoyé par les Canadiens et de livrer la marchandise. Il semble très peu probable que nous assistions à une nouvelle élection au cours des 18 prochains mois. De plus, la Confédération, composée en grande majorité de premiers ministres de tendance conservatrice, continuera d'être une épine dans le pied de M. Trudeau.
Parti conservateur
Erin O'Toole a audacieusement orienté son parti vers le centre, a formulé un plan axé sur la classe ouvrière et s'est assuré de ne pas répéter l'erreur de son prédécesseur, en exprimant rapidement et clairement ses valeurs pro-choix. Le Parti conservateur, que l'on donnait perdant dès le départ, a passé plusieurs semaines en tête dans les sondages, mais il était constamment à la traîne en termes de nombre de sièges. Le Parti conservateur a de nouveau remporté le vote populaire, un lot de consolation sur lequel il peut s'appuyer. Malgré des percées dans les Maritimes, le parti n'a pas été en mesure de menacer véritablement les libéraux en Ontario. Le débat en anglais, qui a propulsé le Bloc québécois, pourrait avoir coûté quelques sièges aux conservateurs au Québec, malgré l'appui très médiatisé du premier ministre François Legault. La modeste montée du PPC lui a peut-être aussi nui dans la dernière ligne droite. Dans l'ensemble, la reconnexion avec ses racines progressistes-conservatrices n'a pas donné les résultats escomptés. Erin O'Toole va probablement obtenir une autre chance à la tête du parti. Cependant, il a eu du mal à améliorer sa notoriété et devra faire face à un caucus de l'Ouest qui ne manquera pas de contester la nouvelle orientation politique du parti.
Bloc québécois
Le Bloc québécois visait ouvertement 40 sièges. Si l’on considère cet objectif, les résultats d'hier sont décevants. Le chef Yves-François Blanchet a connu un début de campagne difficile. Il a passé plusieurs jours à se faire coincer par les médias pour tenter de justifier son soutien au projet de troisième lien Québec-Lévis, une position adoptée pour tenter de gagner des sièges supplémentaires dans la région de Québec, ce qu'il n'a finalement pas réussi à faire. Les compétences supérieures de Blanchet en matière de débat ont été mises à l'épreuve : le charismatique orateur s'est montré hostile par moments. Cependant, il a hérité d'un cadeau inattendu lors du seul débat en anglais : une question mal formulée qui a donné à la plupart des Québécois l'impression que la défense de leur identité pouvait être considérée comme discriminatoire. Cela a donné un coup de pouce de dernière minute à M. Blanchet qui lui a permis d'obtenir un résultat plus satisfaisant. Le Bloc voulait devenir le parti fédéral le plus important au Québec, mais il continue de tirer de l'arrière par rapport aux libéraux. Le Bloc a-t-il atteint son plafond? Les Québécois ont-ils vraiment besoin d'un chien de garde à Ottawa alors qu'ils comptent sans doute le premier ministre le plus influent au Canada?
Nouveau Parti démocratique
Les gains modestes du NPD (3 sièges supplémentaires) constituent un résultat mitigé. D'une part, le parti a remporté de petites victoires, notamment en réussissant à conserver son seul siège au Québec. D'autre part, alors que les observateurs et les experts se sont surtout concentrés sur l'incapacité de Jagmeet Singh à relancer la vague orange, le nombre de sièges du parti a tout simplement stagné sous la direction de M. Singh lors des deux dernières élections. On le considère généralement comme étant un leader charismatique qui mène de bonnes campagnes. Ceci étant dit, le parti n'a pas été en mesure de dépasser les libéraux auprès de l'électorat de centre-gauche depuis 2015. Le NPD n'a pas non plus fait de percées auprès des jeunes et des communautés multiculturelles des centres urbains, notamment dans la région du Grand Toronto, des circonscriptions que le chef du NPD avait promis de courtiser et de conquérir en 2017. Plusieurs électeurs considéraient aussi que M. Singh se présentait face à un parti (le Parti libéral) qu'il avait aidé à gouverner pendant près de 18 mois. Puisque que le NPD est fermement ancré en tant que conscience morale du Parlement, les questions relatives aux intentions du parti d'accéder un jour au pouvoir ne manqueront pas de faire surface.
Parti vert
Le Parti vert n'a jamais été vraiment dans la course dans le cadre de cette campagne fédérale. Annamie Paul n'a pas réussi à regagner la confiance de son équipe. Elle s'est isolée dans la circonscription du centre-ville de Toronto qu'elle convoitait, un bastion libéral qui semblait très peu enclin à lui donner une chance, comme l'a prouvé son humiliante quatrième place. Pire encore : certains candidats verts ont ouvertement déclaré qu'ils ne voulaient tout simplement pas faire campagne avec elle. L'ancienne leader Elizabeth May, qui sera de retour pour un quatrième mandat, reviendra au Parlement en compagnie de sa nouvelle collègue de l'Ontario. La performance de deux sièges des verts entraînera le départ inévitable de Mme Paul. Les verts n'ont pratiquement aucun élan, et ce, au pire moment possible, avec une crise du changement climatique de plus en plus préoccupante. Ce qui soulève la question suivante : le changement climatique est-il vraiment une question de l'urne?
Parti populaire du Canada
Mis à l'écart dès le début de la campagne, absent des trois débats des chefs, le parti a tout de même réussi à faire sa marque en se ralliant au mouvement anti-vaccin. Si Maxime Bernier n'a pas réussi à reconquérir son siège en Beauce, il continuera à gêner la classe politique fédérale actuelle en raison d’une caisse électorale étonnamment garnie. De plus, en atteignant la barre des 4 % des voix, M. Bernier est assuré de participer au prochain débat des chefs, une plateforme qui lui permettra de présenter son programme à un public plus large. C'est la preuve qu'un parti peut réellement « gagner » quelque chose même s'il n'a pas obtenu de siège.
Ainsi, après 36 jours, les Canadiens se retrouvent essentiellement avec le même parlement fédéral. Sur le plan politique, la victoire des libéraux garantit que leur accord sur les garderies sera pleinement mis en œuvre. Et les répercussions connexes sur des secteurs tels que les soins de santé, l'agriculture, l'innovation, l'énergie, les technologies propres et d'autres resteront sensiblement les mêmes, à moins de changements majeurs de la part des libéraux.
En somme, le prochain parlement exigera à nouveau la collaboration, le compromis et la médiation, et tout mandat d'affaires publiques nécessitera une planification minutieuse et un engagement avec plusieurs partis, quel que soit l'objectif principal. Il n'y aura pas de « recette miracle » à suivre.
L'équipe pancanadienne de NATIONAL en affaires publiques analysera soigneusement les données et les répercussions de l'élection 2021. Notre équipe d'experts est sans égale au Canada, détenant une expérience approfondie dans tous les grands marchés canadiens et une présence partout au pays. Quel que soit le mandat, nous sommes bien positionnés pour vous aider à atteindre vos objectifs stratégiques.
Nous sommes impatients discuter avec vous.
Consultez notre section spéciale Élection fédérale 2021 pour retrouver les plus récentes perspectives de nos experts.
——— Tiéoulé Traoré était directeur, Relations gouvernementales au Cabinet de relations publiques NATIONAL